Nous sommes indignés!

Algérie : le combat des victimes de la décennie noire est le combat de tous !

 

Nous, citoyennes et citoyens algériens, qui avons connus les affres de la guerre civile en Algérie durant les années 1990 avec son cortège de disparitions forcées, de massacres, d’exécutions sommaires, d’assassinats, de victimes de torture et de viols ;

Nous qui avons toutes et tous une mère, un père, un frère, un cousin ou un proche, torturé, disparu, enlevé par les forces de l’ordre, ou sauvagement assassiné par les membres des groupes armés se réclamant de l’islam ;

Nous qui aspirons à un État de droit, à une justice indépendante et impartiale en Algérie, à une paix durable vraiment fondée sur la vérité et la justice, le respect mutuel et la dignité humaine, à la différence du déni organisé par la Charte nationale pour la paix et la réconciliation de 2005 ;

Nous qui observons la répression féroce que subissent les militants et défenseurs des droits de l’Homme, les atteintes quotidiennes au droit de manifester, de se rassembler, de s’organiser ainsi que les restrictions de nos libertés fondamentales par le biais de pseudo-réformes de circonstances ;

Nous, citoyennes et citoyens du monde, qui avons toujours tenu à exprimer notre solidarité avec les victimes des violations des droits de l’Homme et avec ceux qui se battent pour faire triompher l’État de droit en Algérie.

 

Sommes indignés face à l’acharnement des autorités algériennes à l’encontre des familles de disparu(e)s, manifesté en particulier par le président de la CNCPPDH (Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme). Nous souhaitons vivement que cette dite « institution », qui se prétend « indépendante », cesse d’entraver les efforts de celles et ceux qui se battent pour la vérité et la justice ;

Indignés, également, face aux pratiques de la CNCPPDH imposées aux victimes, qui supposent que « réparation » devrait être synonyme de « renoncement » : renoncement à la vérité sur le sort de son proche, renoncement à la désignation et la condamnation par la justice des personnes responsables d’actes criminels, ainsi que leurs complices.

Indignés, surtout, face au mutisme de cette institution quant aux agressions, à la répression des syndicalistes autonomes, des militants et des défenseurs des droits de l’Homme par les autorités de notre pays ;

Indignés, encore, face à l’incapacité des institutions algériennes de régler les problèmes politiques d’une façon efficace, à leur acharnement à préférer le déni et l’alimentation des injustices. L’échec de la Charte nationale pour la paix et la réconciliation sur le plan national et la rétrogradation de la CNCPDDH par le Comité international de coordination des institutions nationales (CCI), sur le plan international, en sont la preuve ;

Indignés, enfin, face au manque de respect des engagements pris par les autorités algériennes et surtout à l’image négative du pays qu’elles véhiculent sur le plan national et international.

 

Le combat des familles des disparus en Algérie, de toutes les victimes de la décennie noire, n’est pas celui de personnes isolées, comme le martèle depuis des années le président de la CNCPDDH, mais bel et bien celui de toutes celles et de tous ceux, vivant en Algérie ou à l’étranger, qui, épris de justice et de démocratie, aspirent à la paix et œuvrent à la fois pour l’établissement d’un réel État de droit, l’établissement de la vérité et de la justice en Algérie et pour le maintien de la mémoire vive de tout un peuple.

 

 

Alger-Paris, le 20 juin 2012

 

 

Premières signataires :

Nesroulah Yous, Fatima Yous, Ali Yahia Abdennour, Abdelkader Benaziza, Hacène Ferhati, Lahouari Addi, Nedjma Benaziza, Amine Sidhoum, Salima Mellah, Abdou Bendjoudi, Mourad Ouchichi, Djameleddine Benchenouf, Nacer Boudiaf, Omar Daoud, Zaima Benachour, Kaddour Chouicha, Yacine Zaid, Yahia Assam, Kamel Daoud, Said Salhi, Mourad Tchiko, Ahmed Kaci, Ouheb Hamidi, Sanhadja Akrouf, Faiza Ait-Larbi, Naoual Harkat, , Samia Ammour, Linda Bougherara, Meriem Benaziza, Saida Rahal-Sidhoum, Brahim Senouci, Ahmed Hanifi, Samir Zaouaou, Sofiane Chouiter ,

 

 

Avec le soutien de :

Abdessalam Kleich,