Refus de la suppression des CPGE littéraires à Poitiers

Anaïs Ben hammou, khagneuse à C.Guerin

/ #138 Sujet

2014-06-01 10:41

Etudiante en khagne à C. Guérin, plus qu'un commentaire j'aimerais apporté mon témoignage, celui-ci pour être fidèle doit remonter à mes origines. Derrière ma détermination se cache une femme de courage qui après de dures épreuves est arrivée en France en 1981, elle s'appelle Fatima, c'est ma grand mère, ma "yama". Immigrée, analphabète, pauvre ... toutes les conditions étaient réunies pour la réduire au silence et à l'isolement. Pour en sortir elle a fait ses études par procuration à travers les miennes. La langue française aura été pour elle le rêve de l'indépendance. Cet amour du français c'est ce qu'elle m'a transmis, c'est aujourd'hui ce que je défends. Ma scolarité brillante est une victoire que je dédie à ma famille. Fierté de mon lycée de Zep j'ai décroché mon Bac ES avec mention TB et la même année j'étais admise à Science Po Bordeaux. Pourtant au dernier moment j'ai pris le risque de me désinscrire de l'Iep pour m'aventurer en classe prépa, ce monde inconnu dont je ne savais qu'une chose :"qui entre en ces lieux doit abandonner tout espoir de vie sociale pendant 2 ans". Cette décision je n'ai jamais eu à la regretter. Au contraire, j'ai pu déployer mes qualités en prépa, surtout en khagne. La prépa a vraiment était une chance pour moi, partie de rien je me retrouve aujourd'hui avec un capital culturel que peu de personnes issues de mon milieu possèdent, surtout à 20 ans. Le cliché de l'élitisme concerne surtout les prepa parisiennes où sont réunis les "fils à papa", mais moi, je suis fille et petite fille d'ouvrier ...les prepa de province ouvrent ce système scolaire très performant à des candidats de tous horizons, voilà un aspect tangible de la méritocratie républicaine.Les Cpge sont plus qu'un simple tremplin vers l'Ens, c'est une formation précieuse et de qualité qui est honnorable en et pour elle-même. Quoi que l'on puisse en penser ceux qui n'obtiennent pas l'Ens ne sont pas les reflets d'un échec pitoyable, au contraire ils sont les archers de la réussite, car vous savez la réussite ce n'est pas un diplôme c'est un état d'esprit, prenez-le pour dit !Alors oui, à Poitiers nous n'avons pas les meilleurs résultats, mais nous n'avons pas les pires. Nous avons nos chances comme les autres candidats. Toute approche quantitative est réductrice, il faudrait être aveugle pour ne pas voir les débouchés nombreux et prestigieux auxquels accèdent les étudiants de C. Guérin.Faire une classe prépa ce n'est pas partir à la conquête du Graal, ce n'est pas une mission impossible, c'est un voyage sans retour où l'on apprend à dominer sa peur et à s'affirmer. On y trouve le bonheur d'un esprit libre et ambitieux.

Si le voyage et l'aventure forme la jeunesse que tous les jeunes de France est accès à la prépa.

Ne nous refusez pas l'excellence, en province aussi nous en sommes dignes ! Ne fermez pas nos prepa faites les plutôt prospérer pour le bien de tous (même de ce géant sans foi ni loi que l'on appelle économie). Ne faites pas des économies sur notre avenir, sur nos espoirs car nous sommes l'avenir et l'espoir de la France. Faîtes-en plutôt sur le faste et le superflu qui vous entoure. Notre prépa, notre ville, notre région nous les défendrons contre cette offensive brutale qui fait pâlir Marianne, cette belle allégorie de la démocratie française.