MANIFESTE POUR UNE NOUVELLE REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

MOUVEMENT CITOYEN FINI KODÉ

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MANIFESTE POUR UNE NOUVELLE REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

 

Plus de cinquante ans après l’accession de notre pays à l’indépendance, notre peuple n’a  connu que déception et désillusion. Le bilan dans tous les domaines est catastrophique à tout point de vue. Les promesses répétées d’une société juste, moderne, prospère et harmonieuse ne se sont pas réalisées. Un échec, qui, en un demi-siècle est à la hauteur de notre désenchantement.

La République Centrafricaine, malgré ses nombreuses potentialités en ressources naturelles nettement supérieures à beaucoup d’autres pays africains, est demeurée en queue de peloton. En 2009, elle était classée 179ième sur 182 pays au niveau de l’indice de développement humain (IDH) du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Autrement dit, ni la souveraineté politique encore moins l’indépendance économique et sociale de notre pays ne sont assurées.

La célébration en 2010 des cinquante ans d’indépendance, contraste donc singulièrement avec la misère criarde de la majorité de nos concitoyens. Sitôt  les lampions éteints, les mêmes mots et les mêmes attitudes qui sont à l’origine de nos maux depuis ces cinq dernières décennies ont ressurgi et sont toujours d’actualité ; pire, ils se sont accentués de régime en régime.

Tous les régimes qui se sont succédé au pouvoir ont agi de la même manière. Les dirigeants respectifs se sont placés, sans aucune exception, dans une posture post et néocoloniale dans le seul but d’opprimer le peuple, de satisfaire aux diktats et autres recommandations de leurs mentors. Aucun de ces régimes n’a pu prendre un véritable tournant décisif pour impulser le pays sur la voie du développement social durable. Pour ces dirigeants, s’enrichir le plus rapidement possible a toujours été un leitmotiv, afin disent-ils, de prendre une revanche sur l’on ne sait qui ni quoi. Le syndrome de l’enrichissement rapide et illicite a contaminé tous les hauts cadres, cadres, agents de l’administration publique et des entreprises paraétatiques. La corruption, le détournement des fonds  et des biens publics, les abus de confiance, ce,  avec la bénédiction des principaux dirigeants politiques en sont les désastreuses conséquences.

En l’absence d’une éthique et d’une déontologie, ces « hommes politiques » irresponsables ont fonctionné de la même manière. Pour des besoins bassement égoïstes, ils n’ont eu de cesse de diviser la Nation, en surfant sur la fibre clanique et tribale. Ils ont ainsi sacralisé la médiocrité en nommant à la tête des sociétés paraétatiques et dans les hautes fonctions de l’État, leurs enfants, parents et amis incompétents. Ils ont fait preuve d’un manque de vision et d’une stratégie à long terme qui aurait pu jeter les bases d’une société moderne et performante. Cette gouvernance à vue s’est traduite par une totale absence de politique sociale depuis un demi-siècle. Ce faisant, ils ont sciemment bloqué le processus de compétition qui aurait pu galvaniser et faire émerger une classe moyenne.

De même, une multitude de partis politiques à l’idéologie indéterminée, prête à tisser des alliances contre-nature avec le régime en place au gré de leurs intérêts du moment. Ces formations politiques à la tête desquelles se trouvent des leaders versatiles, cupides et sans conviction ont complètement faussé et tronqué le jeu politique qui consiste à proposer une véritable alternance. En permanence dans une stratégie de repositionnement, ils se sont compromis, définitivement, et ont perdu toute crédibilité.

Par ailleurs, une certaine intelligentsia conformiste, ayant lamentablement échoué dans sa stratégie de l’entrisme, étonnamment muette, n’aspire désormais qu’à la tranquillité qu’offre la proximité du pouvoir au lieu de jouer son rôle d’avant-garde, de précurseurs d’idées, de leaders d’opinions. Alors qu’en d’autres lieux, les intellectuels sont les défenseurs des sans voix, en Centrafrique, ils ont la particularité de collaborer avec les bourreaux du peuple. Ils sont de ce fait des complices plus ou moins actifs de l’oppression de nos concitoyens.

 

De l’illégitimité du régime en place

Aujourd’hui, la gestion de l’État est plus que jamais marquée par l’omniprésence d’un cercle familial et clanique qui s’est avéré être nuisible dans les structures étatiques ainsi que dans les circuits économiques de notre pays. Par népotisme, le clan familial du président a verrouillé l’accès de ces organismes aux plus méritants de nos concitoyens pour ne privilégier que les médiocres. Avec la bénédiction de son chef, la milice de la garde présidentielle cultive et entretient une politique de la terre brûlée pour soumettre par la cruauté et la terreur  notre bon et généreux peuple. Le régime illégitime du Général- Président a ainsi érigé les violations massives et répétées des droits de l’homme en méthode de gouvernement.

 

En falsifiant les résultats des dernières élections groupées, le pouvoir de Bangui a méprisé et confisqué au peuple centrafricain son libre droit de manifester sa souveraineté à travers l’expression du suffrage universel. De ce fait, ce régime a créé toutes les conditions pour diviser notre jeune Nation. En cela et pour cela, il n’est plus légitime.

 

D’ailleurs, et nous le disons, un régime légitime ne peut tuer des centaines de ses habitants ni provoquer la fuite et le refuge de plus de 300.000 Centrafricains au Sud du Tchad, à l’Ouest du Cameroun et au Sud du Soudan, encore moins forcer à l’abandon de leurs foyers et au déplacement intérieur plus d’un demi million de nos concitoyens obligés de se terrer dans des zones insalubres, inhabitables et ce, dans le dénuement le plus total. De même un gouvernement responsable ne peut assister d’une manière aussi passive aux exactions d’étrangers armés tels que la LRA (l’armée de résistance du seigneur) sur le territoire national.

 

Un pouvoir légitime ne laisse pas ses populations mourir de faim comme c’est le cas à Berberati avec la malnutrition aigüe, conséquence logique d’une politique de prédation.

 

De la nécessité d’agir

Nous sommes un groupe de citoyens responsables, qui compte désormais prendre part activement à tous les débats sur les problématiques sociétales dans notre pays, proposant des solutions innovantes et pragmatiques en rupture totale avec les anciennes pratiques.

 

Ainsi, nous voulons provoquer une prise de conscience de notre population. Nous sommes conscients que la pérennité de la Nation centrafricaine passe par sa capacité à survivre dans ce monde en perpétuelle compétition. Pour cela, elle passe nécessairement par la compréhension et  l’assimilation des codes et des règles qui régissent les sociétés humaines, tant au niveau nationale, régionale qu’internationale. Ceux-ci ne s’acquièrent que par l’éducation et la réappropriation d’un savoir ancestral approprié à la modernité.

 

Le mouvement citoyen Fini Kodé qui veut dire en Sango, notre langue nationale, « la nouvelle manière de faire ou la nouvelle manière de pratiquer » résulte en fait d’une longue maturation qui a abouti sur  une profonde prise de conscience de ses membres fondateurs. Elle s’inscrit  dans une logique de rupture avec cette mentalité de soumission de l’homme  envers l’homme. Au fil du temps et des générations, le Centrafricain a intégré dans son comportement le réflexe de la soumission au point de ne pas revendiquer son propre droit, le droit à une meilleure vie, le droit de vivre tout simplement comme un homme dans un pays qui est le sien.

La résignation et le sentiment d’impuissance sont si profonds que nos compatriotes d’une manière générale se sont habitués à attendre très peu de leurs gouvernants, par conséquent à fournir peu d’effort. Au fil du temps, les différents régimes qui se sont succédé ont plutôt  encouragé la médiocrité au dépend du mérite. Cela a eu le désavantage de décourager les bonnes volontés et de les réconforter dans cette position.

La démission est devenue la solution dans un pays où l’impression d’abandon prédomine, tant les problèmes sont nombreux et variés. Ce qui favorise et développe une culture de fatalité, de refuge systématique dans des confréries et autres sectes confessionnelles.

En revendiquant le droit au respect et à la souveraineté, le mouvement citoyen Fini Kodé affirme sa volonté de s’émanciper des tutorats, des diktats et de toutes les dérives autoritaristes. Par ailleurs, il proclame son refus catégorique du clanisme, de la pauvreté, de la misère sous toutes ses formes et érige le pragmatisme, la citoyenneté, l’équité en méthode de fonctionnement. En même temps, celui-ci promeut en des principes intangibles dans la vie publique des valeurs morales, du mérite, de la compétence, de l’équité, de la laïcité et du droit. En cela, il consacre la citoyenneté comme valeur fondamentale.

Un  nouveau départ  s’impose pour notre pays, car les partis politiques classiques et les leaders qui ont exercé le pouvoir politique dans notre pays ont lamentablement échoué. L’heure est venue de s’engager pour notre pays. Il vous appartient maintenant de vous investir et de prendre des responsabilités dans un cadre nouveau et ouvert à toutes les bonnes volontés, à toutes les bonnes compétences.

Personne ne viendra vous dire que vous êtes des militants de la vingt-cinquième heure, personne ne viendra vous dire que vous êtes trop jeune ou que vous manquez d’expérience pour prendre des responsabilités, personne ne viendra vous dire que vous n’êtes pas de la bonne ethnie ou de la bonne famille pour prendre des responsabilités. Baptisons ensemble la nouvelle République Centrafricaine. Elle commence dès aujourd’hui avec vous et avec toutes les bonnes volontés. Cette œuvre s’édifiera uniquement sur des considérations objectives basées sur la compétence et le mérite. Avec Fini Kodé, l’homme qu’il faut doit être à la place qu’il lui faut. Sinon nous referons ce que nos aînés ont fait en tombant tout simplement dans le piège destructeur de la préférence clanique et du clientélisme par conséquent de la médiocrité.

Par ce manifeste, nous, membres fondateurs du Mouvement citoyen Fini Kodé en appelons à la responsabilité historique de nos concitoyens, de tous les républicains et démocrates qui veulent ici et maintenant que s’opère un véritable changement dans notre pays  à nous rejoindre en vue de mener des actions, au-delà des positionnements partisans, des intérêts catégoriels, claniques et politiciens pour atteindre l’objectif commun : La renaissance d’une République Centrafricaine animée de l’esprit Fini Kodé.

 

Fait à Bangui, le 18 avril 2011

 


Mouvement Fini Kodé    Contacter l'auteur de la pétition