Appel pour de vraies réformes en Tunisie

Nous avons changé d’époque. La Tunisie d'aujourd'hui a besoin de démocratie, de libertés et de justice sociale.

 

La « révolution » tunisienne vient d'exprimer une exigence de liberté et de dignité. Elle témoigne d’une profonde volonté de changement. L'espoir qui s'est levé de construire une Tunisie libre, démocratique et fraternelle ne saurait être déçu. Or, nous avons déjà des raisons d'être inquiets.

 

La multiplication des déclarations, des postures rétrogrades et extrémistes à fondement religieux, parfois teintées d’un léger vernis démocratique, lorsqu’elles ne s’accompagnent pas de violences ; la persistance de l’imbrication du religieux et du politique ; les récentes décisions du gouvernement transitoire (décret-loi du 1e avril 2011…) qui ne répondent pas aux attentes du pays, font apparaître au grand jour des orientations conservatrices, menaçantes pour notre avenir.

 

Confronté à de multiples défis qui sont d'ordre politique, économique et social et à la nécessité d'engager de véritables réformes ouvrant la voie à des changements profonds et durables, notre pays ne peut s’en remettre aux dirigeants d'aujourd'hui qui sont encore parfois ceux d'hier.

 

Dans la période actuelle, nous avons besoin d’innover et de progresser. A l’approche d’échéances électorales importantes, il faut, à tout prix, éviter de nouvelles dérives autocratiques, éloigner les menaces d’où qu’elles viennent, qui pèsent encore sur les libertés et construire un projet de société.

 

C'est pourquoi nous demandons :

 

- l'abrogation immédiate de tous les décrets incohérents ouvrant la voie à la régression ;

- le recours systématique à la loi pour mettre fin aux actes d’intimidation visant à empêcher les citoyens d’exercer leur libre arbitre et de s'exprimer librement sur l'avenir du pays ;

- la définition, dans la transparence, de nouvelles règles électorales afin de garantir la liberté de choix des électeurs et la sincérité du scrutin, notamment en vue de l'élection d'une assemblée constituante ;

 

En outre, nous exigeons que les principes suivants soient inscrits dans la nouvelle Constitution :

 

- édification d'un État de droit avec une séparation effective des pouvoirs et la garantie de l'indépendance de la justice et des juges ;

- consécration de toutes les libertés publiques et protection des droits de l’homme par un système effectif de sanction contre toute violation ;

- abolition de la peine de mort ;

- reconnaissance de l'égalité absolue entre les hommes et les femmes entraînant la suppression de toute discrimination ;

- création d'une cour constitutionnelle protégeant les droits fondamentaux et pouvant être saisie par les citoyens ;

- séparation de l'État et de la religion et reconnaissance de la liberté de conscience et de culte avec la sécularisation de toutes les institutions civiles et politiques ;

- établissement de la justice sociale avec la reconnaissance du droit de grève et des libertés syndicales ; affirmation du premier des droits de l’homme : pouvoir travailler et vivre dans la dignité.